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Adapter les standards universels aux contextes locaux

Formation sur les abris communautaires dans la République de Vanuatu, archipel dans l’Océan Pacifique Sud frappé par le cyclone Pam en janvier 2015. Photos © Save the Children Australia

La contextualisation des standards humanitaires est souvent mal comprise ou mise en œuvre. Partant de ce constat, trois étudiants de troisième cycle de la London School of Economics and Political Science ont mené un projet d’étude d’une durée de six mois sur les défis et opportunités d’une adaptation des standards Sphère aux situations locales.

Le processus de contextualisation consiste à tenir compte de la situation locale pour interpréter les standards en vigueur et adapter les indicateurs afin de permettre une application pertinente. L’importance de la contextualisation tient au fait qu’elle améliore l’efficacité de l’assistance humanitaire et soutient les acteurs sur le terrain dans l’optimisation des opportunités locales et la réduction des erreurs.

L’étude porte principalement sur la mesure dans laquelle les standards de Sphère peuvent être contextualisés par différents acteurs et dans différentes situations d’intervention. Les auteurs proposent également des enseignements permettant une contextualisation à la fois adaptée et efficace.

L’étude se penche sur la manière dont les standards relatifs aux Abris, habitat et articles non alimentaires du Manuel Sphère ont été adaptés en réponse à trois catastrophes naturelles : le typhon Haiyan aux Philippines en 2013, et en 2015 le cyclone Pam au Vanuatu et les inondations au Malawi. La portée limitée du projet de recherche n’a pas permis d’inclure de crises en lien avec des conflits.

En cherchant une réponse à leur principale question, les auteurs étudient également en profondeur quatre critiques que les écrits universitaires adressent au Manuel Sphère, à savoir : Les standards Sphère sont-ils trop rigides pour que leur contextualisation soit intelligible ? Les standards sont-ils réellement mondiaux ? Abordent-ils les questions humanitaires clé ? L’approche qui repose sur les droits, que promeut Sphère, peut-elle être mise en œuvre partout dans le monde ?

À partir de leur analyse des trois études de cas, les auteurs concluent qu’en majeure partie ces critiques « proviennent d’un manque de compréhension de la manière d’utiliser le Manuel Sphère de façon à la fois efficace et holistique ».

L’utilisation holistique du Manuel implique que les « chapitres techniques » (Abris, habitat et articles non alimentaires, par exemple) soient lus et utilisés en même temps que les « chapitres fondamentaux » (à savoir la Charte humanitaire, les Principes de protection et les Standards essentiels, désormais remplacés par la Norme humanitaire fondamentale – CHS).

Les études de cas ont démontré que les réponses aux trois catastrophes naturelles se sont révélées être de bons exemples d’une telle approche holistique. Dans les trois cas, les standards essentiels et/ou les Principes de protection ont été utilisés pour saisir l’ensemble des paramètres des contextes, des coutumes et traditions locales et ont su impliquer l’ensemble de la communauté locale, y compris les groupes vulnérables, dans la conception puis l’adaptation conséquente de leur réponse à la catastrophe.

L’étude a permis de révéler un niveau de connaissances déséquilibré entre le personnel d’encadrement et le personnel de première ligne. Dans l’ensemble, le personnel d’encadrement est généralement mieux formé au Manuel Sphère et à son utilisation adéquate. Du fait de leur formation plus formelle ou de leur exposition à Sphère, ils ont souvent « une perception plus favorable et détachée du Manuel ».

Mais alors que les membres du personnel de première ligne, qui se trouvent au premier niveau de l’intervention, seraient les mieux placés pour contextualiser les standards selon les réalités du terrain, ils pâtissent souvent d’une moins bonne compréhension du Manuel, généralement du fait d’un manque de formation et d’exposition aux standards. Ils ont ainsi tendance à « ignorer les standards ou à les percevoir comme ‘la parole immuable de Dieu’ ».

Les auteurs de l’étude indiquent qu’une orientation plus ciblée par le bureau du Projet Sphère, ainsi qu’une formation opportune et efficace -particulièrement pour le personnel de première ligne – pourraient atténuer certaines de ces perceptions et faire du Manuel un meilleur outil de travail.

L’étude révèle que les personnels étrangers des agences internationales à l’œuvre sur le terrain ne sont pas les seuls à devoir se préoccuper de la contextualisation des standards humanitaires. « Les acteurs locaux doivent également adapter leur travail, car nombre d’entre eux n’ont souvent pas conscience de la spécificité des conditions dans les diverses communautés et au sein de différents groupes sociaux. »

Les professionnels doivent se prémunir contre les écueils éventuels d’une contextualisation défaillante, ou limitée au simple lancement d’un projet, préviennent les auteurs. « La contextualisation ne peut être laissée au hasard. C’est un processus trop important pour ne pas être entrepris sciemment. »

Si les processus fortement structurés et formels ne sont surtout pas souhaitables, ni réalisables, dans les environnements sous haute pression dans lesquels interviennent les acteurs de l’humanitaire, l’étude recommande qu’un processus à la fois formel et « digeste », soit mis en œuvre de manière critique, réactive et holistique. « Le processus doit allier ampleur et facilité d’utilisation. »

Les auteurs de l’étude recommandent, entre autres, que la prochaine version du Manuel mette davantage l’accent sur la contextualisation, afin que ce processus soit mieux compris par les professionnels.

« Le Projet Sphère devrait proposer des outils optionnels et une orientation, en plus du Manuel, afin de venir en aide aux professionnels lors du processus de contextualisation », conseille l’étude.

Cette étude propose une mine d’enseignements – et particulièrement par le biais des études de cas détaillées- et de recommandations à l’attention du Projet Sphère, des agences humanitaires et des professionnels, ainsi que des gouvernements.

Une dernière recommandation, mais non des moindres, porte sur les communautés concernées. L’étude suggère que les groupes communautaires, structures de gouvernance locale et autres leaders aient connaissance du Manuel Sphère, et le comprennent. « Ceci leur permettrait de participer activement aux programmes relatifs à leur relèvement, et de demander des comptes aux organisations humanitaires en charge de la prestation de l’assistance adéquate. »

Alors que l’étude propose des informations utiles relatives aux défis et opportunités que constitue la contextualisation du Manuel Sphère, les auteurs suggèrent également que d’autres recherches soient entreprises pour mieux comprendre et aborder un certain nombre de problèmes qui demeurent irrésolus.

Les études de cas ont révélé que les acteurs de l’humanitaire sont très enclins à aborder la contextualisation, et qu’il est très important de parler de ce sujet. Les opinions et retours de membres du personnel de terrain et au niveau régional constituent probablement la principale contribution de cette recherche sur la voie de la compréhension de la contextualisation des standards.

Puisqu’il est fort probable que l’édition 2018 du Manuel de Sphère mette cette question en exergue, les conclusions de l’étude seront très probablement examinées de près. Et bien qu’elle ne reflète pas la position officielle de Sphère sur la contextualisation, nous recommandons chaleureusement aux professionnels de la lire et d’envisager les trois études de cas dans le cadre des formations dispensées.

  • Télécharger le rapport (en Anglais) sur l’étude Placing global standards in local context